Présidentielle 2027 : Dominique de Villepin lance le parti La France humaniste et vise l’Élysée

Villepin, très proche du regretté président Chirac cultive une vision solitaire et exigeante de la fonction présidentielle. Sa démarche tranche avec l’hypercommunication actuelle dépourvue de fond. S’il charme par sa hauteur de vue, son manque d’ancrage partisan pourrait aussi freiner sa dynamique électorale dans un paysage fragmenté.

Dominique de Villepin signe un retour inattendu. L’ancien Premier ministre annonce la création de La France humaniste. Ce parti est ouvert et transversal. De plus, il souhaite rompre avec la polarisation actuelle. Alors que la présidentielle de 2027 se profile, il entend se faire entendre. “Je reviens, car le monde ne tient plus”, affirme-t-il, en référence aux multiples fractures économiques, géopolitiques et climatiques.

Dominique de Villepin, orateur inoubliable à l’ONU en 2003, incarne une posture gaullienne faite de solennité et d'éloquence. Son retour repose sur ce capital d’autorité qu’il oppose aux logiques démagogiques. Mais cette hauteur, parfois perçue comme distante, peut l'éloigner d'une génération en quête de proximité.
Dominique de Villepin, orateur inoubliable à l’ONU en 2003, incarne une posture gaullienne faite de solennité et d’éloquence. Son retour repose sur ce capital d’autorité qu’il oppose aux logiques démagogiques. Mais cette hauteur, parfois perçue comme distante, peut l’éloigner d’une génération en quête de proximité.

Ce nouveau mouvement, dirigé par Benoît Jimenez, maire UDI de Garges-lès-Gonesse, se veut implanté dans les territoires. Gratuit, sans cotisation, et composé de comités locaux, il ambitionne de réconcilier les citoyens avec la politique. Une trentaine d’antennes sont déjà actives, selon les organisateurs. Cette démarche d’ancrage territorial s’inscrit dans une stratégie de réappropriation de la parole politique par la base.

Dans un pays où la confiance dans les partis traditionnels s’érode, Villepin mise sur une troisième voie : ni populiste, ni technocratique. Une alternative enracinée dans les valeurs républicaines, mais attentive aux urgences contemporaines.

Une lecture critique de la scène internationale

Le diagnostic de Dominique de Villepin est sans concession. Pour lui, la diplomatie est en lambeaux. Il condamne les frappes américaines en Syrie et en Irak, qu’il juge “illégales et contre-productives”. Son jugement repose sur une conviction ancienne : sans respect du droit international, le chaos se propage. Il estime que "nous sommes entrés dans une ère de brutalité décomplexée". Il rappelle son discours à l’ONU en 2003. À cette occasion, il s’était opposé à l’intervention américaine en Irak.

Ce constat mène à une alerte : le retour de la guerre comme outil politique. Villepin insiste sur le fait que les puissances occidentales doivent cesser d’isoler le sud global, sous peine de déclencher une guerre des blocs. Selon lui, la France, puissance moyenne et dotée d’une tradition diplomatique, a un rôle spécifique à jouer : être le pont entre les puissants et les oubliés.

Il propose donc une refondation du multilatéralisme, en renforçant des institutions comme l’ONU ou la Cour pénale internationale. L’objectif : restaurer la confiance dans un ordre mondial régulié, capable de freiner l’escalade et les abus.

Une ambition d’arbitrage et de réconciliation

Villepin ne cache pas ses ambitions élyséennes. Il assure ne pas redouter la règle des 500 signatures. Il estime que sa candidature peut émerger non pas du haut, mais du terrain. “C’est en rendant la parole aux territoires qu’on rendra du sens à la démocratie”, affirme-t-il. Ce positionnement tranche avec la personnalisation actuelle du pouvoir.

Derrière le sourire poli, une volonté de réconciliation : Villepin tente de renouveler son image, longtemps associée à une droite aristocratique. L'ancien diplomate qui n'a jamais été élu  mise désormais sur le terrain et les territoires pour construire une alternative politique plus chaleureuse, bien que son verbe conserve une touche d’élitisme.
Derrière le sourire poli, une volonté de réconciliation : Villepin tente de renouveler son image, longtemps associée à une droite aristocratique. L’ancien diplomate qui n’a jamais été élu mise désormais sur le terrain et les territoires pour construire une alternative politique plus chaleureuse, bien que son verbe conserve une touche d’élitisme.

Son projet repose sur une conception régalienne du rôle présidentiel. Pour lui, le chef de l’État doit être un arbitre, garant des institutions, au-dessus des partis. Il critique le virage hyper-présidentiel amorcé sous Nicolas Sarkozy. Ce virage a été poursuivi depuis, selon lui. Il le juge contraire à l’esprit de la Ve République.

Il se démarque ainsi des Républicains, qu’il trouve trop focalisés sur l’ordre et l’identité. Mais il se distingue aussi de La France insoumise, dont il déplore les outrances verbales. Villepin prône une politique de mesure, ancrée dans la durée, et refusant l’immédiateté.

Un programme écologique et social

Dans son essai Le pouvoir de dire non, paru chez Flammarion, Villepin défend une vision réformiste du pacte social. Il propose de remplacer la réforme des retraites actuelle par un système à points, équitable et lisible. Il s’agit selon lui de retrouver un principe de clarté dans un débat devenu opaque.

Autre axe majeur : la transition climatique. Il souhaite inscrire la neutralité carbone dans la Constitution à l’horizon 2050. Il plaide pour un plan à long terme, accompagné d’investissements massifs dans les infrastructures vertes. De plus, il insiste sur le développement du ferroviaire et l’isolation thermique. L’État, selon lui, doit devenir stratège, comme il l’a été dans les années 1960.

Il propose également une refonte de l’école afin de replacer la culture au cœur de la formation. En outre, il souhaite remettre la langue et le débat au centre du processus éducatif. Il réclame un plan d’urgence pour la lecture et les humanités, afin de lutter contre la fragmentation sociale.

Une stratégie de rupture douce

Dominique de Villepin n’a jamais été un homme de partis. Son parcours le distingue. Diplomate, plume de Jacques Chirac, ministre des Affaires étrangères puis Premier ministre, il a toujours conservé une posture de veilleur. Il revient aujourd’hui, non par nostalgie, mais par refus du renoncement.

Dominique de Villepin lors d’une conférence de presse présentant son nouveau projet politique. Un retour en forme de pari sur la lenteur et la hauteur, contrastant avec l’instantanéité de la politique contemporaine.
Dominique de Villepin lors d’une conférence de presse présentant son nouveau projet politique. Un retour en forme de pari sur la lenteur et la hauteur, contrastant avec l’instantanéité de la politique contemporaine.

La nomination de Benoît Jimenez à la tête de La France humaniste envoie un signal fort. Il s’agit de rompre avec l’entre-soi parisien. Jimenez, maire d’une ville populaire, incarne cette volonté de réconcilier les Français avec la république.

Face à un paysage électoral dominé par l’abstention, le déclassement et le ressentiment, Villepin préfère le dialogue à la confrontation. Sa stratégie repose sur la patience, la mémoire longue, et la réhabilitation du temps politique.

Une troisième voie ambitieuse et incertaine

La création de La France humaniste marque une tentative rare : celle de refonder le politique par le haut, sans renier le terrain. Son succès reste incertain. Mais sa méthode tranche avec la mécanique classique des candidatures.

Dans une France divisée, souvent tentée par les extrêmes ou le détachement, Dominique de Villepin propose une autre lecture. Il parie sur l’histoire, la hauteur de vue et la cohérence. Une proposition qui, sans être tapageuse, cherche à redonner du souffle à une démocratie essoufflée.

Il faudra observer si cette vision peut se traduire en dynamique populaire. Mais elle réintroduit dans le débat public une dimension devenue rare : l’exigence d’élégance politique.

Cet article a été rédigé par Christian Pierre.