UPS supprime 20 000 postes dans un climat incertain

Concept de livraison : portrait du beau livreur afro-américain ou coursier avec boîte appelant le client

UPS, géant américain du transport et de la logistique, a annoncé le 29 avril une réduction massive d’effectifs. Cette mesure affectera 20 000 postes à travers le monde. Cette restructuration chez UPS, qui s’étendra jusqu’en juin 2025, cible principalement les fonctions opérationnelles. Ainsi, les chauffeurs livreurs, manutentionnaires et agents de tri sont les premiers concernés.

73 sites logistiques UPS vont être fermés, marquant un tournant dans l’organisation du groupe. Cette annonce, d’une ampleur inédite, s’inscrit dans la continuité des 12 000 suppressions de postes décidées en janvier. En effet, ces suppressions concernaient principalement des cadres supérieurs. Fondée à Atlanta en 1907, l’entreprise emploie aujourd’hui près de 490 000 salariés dans plus de 200 pays.

Symbole mondial de la livraison rapide, le camion marron d’UPS est apparu dès 1919 à Los Angeles. Le brun fut choisi pour sa capacité à dissimuler la saleté, reflet d’un souci d’efficacité avant tout esthétique.
Symbole mondial de la livraison rapide, le camion marron d’UPS est apparu dès 1919 à Los Angeles. Le brun fut choisi pour sa capacité à dissimuler la saleté, reflet d’un souci d’efficacité avant tout esthétique.

Amazon, partenaire devenu trop lourd

L’une des causes profondes de ce plan de licenciement UPS est la remise en question du partenariat avec Amazon. En effet, cette situation a un impact majeur. Le mastodonte du e-commerce pesait jusqu’à 12 % du chiffre d’affaires d’UPS. Une dépendance jugée excessive par les dirigeants, soucieux de diversifier leurs clients et de réduire leur exposition à un acteur dominant.

En vertu d’un nouvel accord conclu en janvier, les volumes confiés par Amazon à UPS devraient chuter de 50 % d’ici 2026. Cette baisse a entraîné une restructuration des capacités logistiques internes. Ainsi, près de 10 % des centres logistiques sont menacés de fermeture. De plus, certaines tournées seront externalisées à des sous-traitants, modifiant en profondeur la stratégie logistique d’UPS.

Une réorganisation dictée par la rentabilité

Malgré ces décisions radicales, les résultats financiers du premier trimestre 2025 dépassent les attentes des analystes. Le groupe a enregistré un chiffre d’affaires de 21,5 milliards de dollars, en recul léger de 0,7 %, mais supérieur aux prévisions. Son bénéfice net a progressé de 6,6 %, atteignant 1,19 milliard.

Ces performances, en apparence solides, masquent une transformation plus profonde du modèle économique d’UPS. L’entreprise souhaite se désengager de segments peu rentables, notamment la livraison de colis à bas coût. Elle veut se concentrer sur des activités à forte valeur ajoutée. Ainsi, UPS mise sur le transport sous température dirigée et la logistique pharmaceutique. De plus, elle investit dans les services pour les entreprises de biotechnologie.

Contexte économique tendu et politiques protectionnistes

La conjoncture économique pèse aussi lourdement sur les stratégies industrielles du secteur logistique. Le retour de mesures protectionnistes portées par l’administration Trump, notamment des droits de douane élevés sur certains produits importés, ralentit les échanges internationaux.

Dans ce contexte, les entreprises de logistique américaines réduisent leurs stocks et adaptent leurs flux. Le marché intérieur se contracte, avec une baisse notable de la consommation des ménages. UPS, fortement exposé à ces dynamiques, subit la pression de ses actionnaires et répond par des ajustements drastiques de ses effectifs.

D’autres acteurs du secteur adoptent des stratégies similaires. DHL, principal concurrent européen, a annoncé en mars la suppression de 8 000 postes à travers le monde. FedEx, de son côté, multiplie les regroupements de plateformes pour générer des économies d’échelle. En outre, elle renforce sa résilience face aux défis économiques mondiaux.

Robotisation et mutations du travail

Au-delà du contexte conjoncturel, le secteur de la logistique mondiale vit une mutation technologique profonde. Depuis 2020, UPS a investi plus de 3 milliards de dollars dans l’automatisation de ses entrepôts. Par ailleurs, elle développe des systèmes de tri robotisés.

Ces innovations permettent d’accélérer les opérations, de réduire les coûts, mais rendent de nombreux emplois redondants. La suppression de postes chez UPS ne s’explique pas seulement par une logique de crise. En effet, elle résulte d’une tendance de fond liée à la digitalisation du travail logistique.

Derrière chaque colis, un visage souvent anonyme. Aux États-Unis, les livreurs représentent près de 60 % des effectifs opérationnels d’UPS, avec une diversité croissante issue des grandes métropoles... Depuis la pandémie, UPS constate une hausse de 30 % des recrutements féminins. Notamment, cela se produit dans les hubs urbains où le service de proximité s'intensifie.
Derrière chaque colis, un visage souvent anonyme. Aux États-Unis, les livreurs représentent près de 60 % des effectifs opérationnels d’UPS, avec une diversité croissante issue des grandes métropoles… Depuis la pandémie, UPS constate une hausse de 30 % des recrutements féminins. Notamment, cela se produit dans les hubs urbains où le service de proximité s’intensifie.

Cette dynamique interroge sur l’évolution du contrat social dans les entreprises logistiques. Les syndicats américains, déjà affaiblis, peinent à réagir efficacement. En Europe, plusieurs organisations professionnelles appellent à un dialogue social renforcé pour encadrer l’impact de ces transformations structurelles.

Vers une logistique plus spécialisée

Pour assurer sa transition, UPS se tourne vers des marchés à forte valeur ajoutée. En avril, l’entreprise a confirmé l’acquisition du groupe canadien Andlauer Healthcare Group, spécialisé dans la logistique médicale, pour 1,6 milliard de dollars. Cette opération s’inscrit dans l’ambition du groupe d’établir une position de leader dans la santé, avec un objectif de 20 milliards de chiffre d’affaires d’ici 2026.

UPS vise à se réinventer en tant que prestataire logistique haut de gamme. En outre, il souhaite répondre aux exigences des secteurs sensibles comme la santé. Le transport de vaccins, de dispositifs médicaux ou d’échantillons biologiques requiert des compétences spécifiques. De plus, cela offre des marges plus élevées et assure une meilleure visibilité financière à long terme.

Une transformation lourde de conséquences

La suppression de 4 % des effectifs mondiaux d’UPS est un signal fort. Elle marque la fin d’une époque, où la logistique était avant tout une question de volume. Aujourd’hui, l’efficacité, la précision et la spécialisation logistique priment.

Cette évolution n’est pas sans dégâts sociaux. En supprimant des milliers d’emplois, UPS soulève des interrogations sur la responsabilité sociale des entreprises multinationales face à leurs salariés. Dans un monde où l’incertitude devient la norme, le modèle économique dominant semble appeler à être repensé.

Plus qu’une entreprise en mutation, UPS reflète les bouleversements d’une économie globalisée en transition. Entre nécessité de compétitivité et exigence de justice sociale, la transformation du secteur logistique devient cruciale. Par conséquent, elle sert d’observatoire précieux des contradictions contemporaines.