
Le 4 novembre 2025, au Brooklyn Paramount, Zohran Mamdani, 34 ans, a conquis la mairie de New York avec plus de 50 % des suffrages, bat Andrew Cuomo et conforte son avance, reléguant Curtis Sliwa. Premier maire musulman de la ville, il veut répondre à la cherté de la vie : gel des loyers à New York pendant quatre ans, 200 000 logements subventionnés, bus gratuits à New York, garde d’enfants universelle à New York. Dès le 1er janvier 2026, sa coalition jeune et diasporique devra prouver sa méthode à City Hall.
Nuit de victoire à Brooklyn
La scène s’ouvre au Brooklyn Paramount, salle de spectacle dressée en forum civique. Le 4 novembre 2025, un tonnerre de voix mêle ferveur et incrédulité lorsque l’annonce tombe : Zohran Mamdani, 34 ans, l’emporte à la mairie de New York avec plus de 50 % des suffrages, devance Andrew Cuomo lors de l’élection municipale, à environ 41,6 %, et Curtis Sliwa à près de 7,1 % selon les résultats de l’élection à New York du 4 novembre 2025. Les bras se lèvent et les téléphones capturent une marée de sourires. Le slogan qu’il publie aussitôt sur X, « Le prochain et dernier arrêt est l’Hôtel de Ville », résonne. En effet, il se présente comme une épure de programme. À Astoria, son fief du Queens, des affiches froissées par la pluie racontent l’autre versant du triomphe, celui d’une patience militante. La ville qui ne dort jamais a basculé dans un récit qui lui ressemble : dense, disputé, obstinément tourné vers le réel.
Une première historique et ses défis
La victoire consacre le premier maire musulman de New York et le plus jeune depuis près d’un siècle. Elle déborde le seul registre symbolique par l’ampleur de la coalition qui l’a portée. Autour de lui se noue un faisceau d’attentes que son entourage résume par une promesse simple : faire du coût de la vie la matrice de l’action publique. Le maire élu martèle un triptyque : gel des loyers à New York pendant quatre ans, construction de 200 000 logements subventionnés, bus gratuits à New York. Il ajoute l’horizon d’une garde d’enfants universelle à New York. De plus, il prévoit des hausses d’impôts pour les entreprises. Les contribuables dont le revenu dépasse 1 million de dollars seront également concernés. L’ambition est frontale, le tempo sera contraint. Prise de fonctions le 1er janvier 2026, le nouveau maire affrontera un appareil municipal éprouvé par des années d’austérité. De plus, les crises en chaîne ont fragilisé la ville. Par conséquent, il devra transformer la ferveur en architecture budgétaire.
Du terrain aux réseaux sociaux
L’itinéraire vers la mairie commence dans les ruelles d’Astoria, où le jeune élu a passé des années à serrer des mains et à écouter des récits de baux précaires et de fins de mois étroites. La campagne a combiné la rigueur d’un porte-à-porte méthodique. En outre, elle a utilisé la vigueur d’une communication numérique. Celle-ci était tenue par une équipe resserrée. Les réseaux Instagram et TikTok ont servi de scène et de laboratoire, où des vidéos courtes, pensées comme des fresques de quotidien, ont viralement circulé. L’imagerie est simple, presque ascétique : bancs de métro, trottoirs de quartier, lumière pâle de fin d’après-midi. Les slogans tiennent en quelques mots, la typographie est neutre, l’intention ne l’est pas. La campagne a serré de près l’idée d’anti-establishment, non par posture. Cependant, elle l’a fait par méticuleuse mise en scène du quotidien urbain.

Primaire démocrate : le vote préférentiel a tranché
La primaire démocrate de juin 2025 fut l’instant de vérité. Le vote préférentiel a joué à plein, redistribuant les voix au fil des éliminations et confirmant la solidité de l’assise Mamdani. Le document du Board of Elections publié en juillet 2025 détaille les transferts de voix et atteste une avance consolidée à chaque round jusqu’à la victoire finale. L’épisode a fait plus que légitimer une candidature. En effet, il a installé le cadre narratif qui perdurera. Celui d’un outsider apprivoisant les règles les plus techniques du jeu pour mieux imposer sa ligne.
Portrait d’un fils des diasporas
Né à Kampala, élevé à New York à partir de l’enfance, Zohran Mamdani s’est façonné à l’ombre d’un double héritage. Le politiste Mahmood Mamdani, son père, a décrit, dans des ouvrages devenus références, les architectures du pouvoir et de la mémoire en Afrique. La cinéaste Mira Nair, sa mère, a offert des images qui circulent d’un continent à l’autre. Entre Bowdoin College et les rues du Queens, le futur maire compose un lexique où s’entremêlent diaspora sud-asiatique, culture hip-hop et sens du rituel politique. Dans son adresse de victoire, il cite Jawaharlal Nehru comme on lance un pont d’une rive à l’autre, signe adressé à celles et ceux qui lisent dans son parcours une promesse d’appartenance élargie. Le geste n’efface pas les controverses, il y répond par la réaffirmation d’un nous municipal et civique.
Adversaires et fractures
Face à lui, Andrew Cuomo, ancien gouverneur, a mené une campagne d’indépendant portée par la promesse de l’expérience et du retour à l’ordre. Il a concédé sa défaite dans la nuit et félicité son vainqueur. Ce geste est rare dans une ville coutumière des prolongations judiciaires. Curtis Sliwa, voix familière des ondes et héraut de l’ordre public, achève la course à distance. La campagne fut rugueuse. Les débats locaux et les emballements nationaux ont mis en avant des sujets importants. Crime, fiscalité, Israël et Gaza, transports et logement étaient au cœur des échanges. Chaque mot dans ces discussions avait un poids considérable. Des figures nationales ont pris la parole. Selon des messages publiés dans la nuit et le lendemain, Bernie Sanders, Alexandria Ocasio-Cortez, Chuck Schumer, Barack Obama, Bill Clinton ont salué la victoire, tandis que des critiques venues de Mike Johnson, Elon Musk ou du ministre israélien Amichaï Chikli ont nourri l’autre récit, inscrivant l’élection dans une conversation transnationale.

Fabrique d’une coalition
La dynamique victorieuse s’est bâtie sur une coalition que la sociologie électorale dessine déjà. Les jeunes électeurs et les classes moyennes fragilisées par l’inflation y occupent la première ligne. Les diasporas ont apporté une énergie logistique et un réseau d’entraide, ce qui a multiplié les permanences de quartier. De plus, elles ont densifié les réunions maisons. Le micro-ciblage numérique a complété cet effort en articulant messages et géographies. Il a aussi croisé les horaires de travail atypiques avec les contraintes familiales. L’originalité ne tient pas aux outils, mais à la cohérence d’ensemble : chaque séquence a préparé la suivante, chaque vidéo renvoyait à une porte où l’on frapperait demain.
Iconographie et musique
La communication a privilégié une iconographie sèche et lisible. Le métro new-yorkais sert de motif et de métaphore. Une vidéo devenue virale montre des portes qui s’ouvrent et une annonce de conducteur : « Prochain et dernier arrêt, City Hall ». La musique joue discrète, échantillonnée comme une pulsation. Loin des envolées, l’équipe a dessiné un storytelling qui refuse la grandiloquence pour travailler le collectif. La certification par des personnalités nationales a offert des moments de caisse de résonance. Cependant, cela n’a pas dilué le centrage municipal du discours.
Inquiétudes et contre récit
La campagne adverse a martelé un autre récit. On y juge le programme « radical » sur l’ordre public et la fiscalité. De plus, on met en doute sa faisabilité budgétaire. Par ailleurs, on brandit régulièrement l’épouvantail de l’exode des contribuables. Des allégations verbales sur la sincérité du scrutin ont circulé sans preuves publiques à l’appui. Le camp Mamdani a opposé des chiffres, une traçabilité des dons et une pédagogie de la priorisation. Le premier test budgétaire surviendra dès les arbitrages. En effet, la première ordonnance devra composer avec les réalités de Wall Street et du Congrès.
Institutions et marges de manœuvre
New York est une architecture institutionnelle fragmentée, où le maire dispose d’un pouvoir ample mais contrôlé par le City Council et par une mosaïque d’autorités publiques. City Hall est le cœur, mais l’impulsion ne suffit pas. Il faudra une majorité pour les grandes réformes. De plus, des alliances seront nécessaires pour les nominations. En outre, une négociation serrée avec les syndicats municipaux et les autorités de transport sera indispensable. La police et la justice new-yorkaises, puissantes et organisées, attendront des signaux. L’État de New York pèsera, la Maison Blanche regardera. Dans cette architecture, la question du logement et la bataille du zoning révéleront rapidement les limites de l’audace. Par conséquent, cela déterminera jusqu’où elle peut devenir une politique publique.
Résonances en Inde et en France
La victoire a traversé l’Atlantique et l’océan Indien. En Inde, la presse a couvert l’événement. Elle a examiné attentivement la trajectoire du fils de parents indiens nés en Afrique de l’Est. De plus, ce dernier est devenu citoyen américain par naturalisation. Les messages de félicitations se sont mêlés aux polémiques. En France, certains éditorialistes ont évoqué la catégorie de la gauche identitaire. D’autres y ont perçu un réalisme social réaffirmé. L’intéressé réagit par des politiques concrètes, maintenant une distance égale entre l’étiquette restrictive et le mot d’ordre dissolvant.
Promesses et contraintes budgétaires
La ville la plus chère du pays est administrée avec des budgets colossaux. Par ailleurs, des arbitrages sont faits sans chercher à plaire à tout le monde. Le financement de la garde d’enfants et des transports gratuits exigera des recettes nouvelles ou des redéploiements. La promesse de gel des loyers à New York pendant quatre ans heurtera des intérêts puissants. Les 200 000 logements annoncés supposeront des réserves foncières et des choix d’implantation qui attiseront les NIMBY de chaque quartier. La méthode annoncée tient en trois mots : prioriser, phaser, expliquer. Un gouvernement municipal se mesure à sa capacité à tenir une ligne dans la durée autant qu’à lancer des signaux.

À New York, la victoire s’évalue en loyers gelés, bus qui roulent, enfants gardés et budgets tenus.
Ce que disent le droit et la certification

Sans anticiper la certification finale du Board of Elections, l’étiquette de « premier maire musulman de New York » ne vaut qu’au périmètre de la ville. Sur les ambitions fédérales parfois prêtées au vainqueur, un rappel s’impose : selon l’article II de la Constitution américaine, la présidence est réservée aux citoyens de naissance. Le reste se jouera à City Hall, dans l’ordinaire des textes et des budgets.