
Le 10 juin 2025, un adolescent de 14 ans a mortellement poignardé une surveillante à l’entrée de son collège à Nogent, en Haute-Marne. Ce fait divers a provoqué un choc national. Ainsi, en pleine émotion collective, Emmanuel Macron a saisi l’occasion pour relancer une proposition qu’il évoquait déjà depuis 2024 : interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans.
Le président, invité sur France 2 le soir même, souhaite imposer cette interdiction dans les mois à venir. Cependant, cela ne se fera pas si un accord est trouvé à l’échelle européenne. "On ne peut pas attendre", a-t-il martelé. Cette déclaration réaffirme sa volonté de réguler l’exposition numérique des plus jeunes.

Une priorité affirmée à l’échelle européenne
Cette idée n’est pas nouvelle. En mai 2025, Emmanuel Macron insistait déjà sur la nécessité d’un contrôle strict de l’âge pour accéder aux réseaux sociaux. Il plaidait pour une législation harmonisée dans toute l’Union européenne. “C’est une compétence qui est à l’Europe”, rappelait-il. De son côté, Clara Chappaz, ministre déléguée au Numérique, avait donné un délai de trois mois pour convaincre les partenaires européens, faute de quoi la France agirait seule.
L’Espagne et la Grèce soutiennent cette initiative. Cependant, au sein de l’UE, un consensus rapide semble difficile à obtenir. L’exemple australien illustre les obstacles que ce type de projet soulève.
L’Australie en exemple… et en avertissement
Fin 2024, l’Australie est devenue le premier pays au monde à interdire TikTok, Instagram et Facebook aux moins de 16 ans. Cette législation ne sera appliquée qu’à la fin de 2025. En effet, des phases de test sur les méthodes de vérification d’âge sont prévues avant.
Cette politique australienne suscite de vives critiques. Amnesty International et les Verts australiens dénoncent un risque d’isolement pour les jeunes déjà en difficulté. D’autres voix, comme celle d’Elon Musk, évoquent une atteinte à la liberté d’expression. De plus, des experts universitaires estiment que cette interdiction ne résoudra pas les problèmes qu’elle vise à combattre.
Un encadrement déjà prévu par la loi française
En France, la loi sur la majorité numérique a été adoptée à l’été 2023. Elle impose une autorisation parentale pour l’accès des moins de 15 ans aux plateformes sociales. Cependant, cette disposition n’a jamais été mise en œuvre. En cause : des incertitudes sur sa conformité au droit européen.

Face à cette inertie, Emmanuel Macron change de ton. Il promet désormais d’agir, même seul, quitte à braver les lenteurs de Bruxelles. Il mentionne des solutions techniques, telles que la reconnaissance faciale, pour garantir le respect de l’âge légal. De plus, il envisage l’analyse d’identifiants numériques comme une option complémentaire.
Une réponse globale à une société en crise
Au-delà du numérique, le chef de l’État dénonce un climat de violence généralisée. “Ce n’est pas un événement isolé”, a-t-il dit, en soulignant la montée des agressions, y compris chez les adolescents. Il évoque des familles explosées, des règles d’autorité affaiblies et une société hyperconnectée qui favorise l’escalade des tensions.
Il propose aussi de renforcer l’interdiction des armes blanches pour les mineurs, en particulier leur achat en ligne. “Un jeune de quinze ans ne pourra plus acheter un couteau sur Internet”, a-t-il prévenu.

Entre émotion et raison : quelle efficacité ?
Cependant, plusieurs voix s’élèvent pour rappeler que l’interdiction seule ne suffira pas. Le contrôle des contenus, l’accompagnement des parents et l’éducation aux médias doivent accompagner toute mesure coercitive. Autrement, ces restrictions risquent de rester symboliques.
L’assassinat de Mélanie, la surveillante de Nogent, a mis en lumière les failles d’un système à bout de souffle. En réponse, le président transforme la douleur en levier politique, en liant violence juvénile et usage des écrans.
La suite dépendra des négociations européennes. Mais déjà, le débat est lancé : peut-on légalement et efficacement interdire les réseaux sociaux aux adolescents ? Et surtout, à quel prix pour leurs libertés ?