Japan Expo 2025 Paris : record d’affluence et plongée dans la pop culture nippone

Une foule impressionnante se presse dans les allées de Japan Expo 2025 Paris, entre cosplayeurs, fans de bande dessinée japonaise et amoureux de pop culture asiatique. L’événement, qui attire chaque été les passionnés de films et séries TV d’animation, incarne la rencontre entre tradition, modernité et jeunesse connectée. Un incontournable pour comprendre pourquoi les Français aiment tant la culture japonaise.

Nous avons arpenté les huit halls du Parc des Expositions de Villepinte où Japan Expo 2025 Paris a pulvérisé tous ses records : près de 230 000 visiteurs malgré la canicule, 835 exposants, 671 invités et 2 861 professionnels accrédités dont 740 venus tout droit du Japon. Durant quatre jours, du 3 au 6 juillet, 674 événements se sont succédé sur 35 scènes : concerts J-pop assourdissants, conférences bondées, finales cosplay XXL. Partout, une marée humaine en kimonos, armures ou uniformes scolaires croisait familles émerveillées et collectionneurs aguerris. Nous avons avancé au rythme des tambours taiko, portés par les effluves de takoyaki et éblouis par les flashs crépitant autour de Junji Itō. Voici notre carnet de route au cœur du plus grand salon manga d’Europe.

Bienvenue dans le plus grand salon manga d’Europe : à la croisée de la bande dessinée et de la pop culture

Marée humaine et cosplayers anonymes : l’essence même de Japan Expo.
Marée humaine et cosplayers anonymes : l’essence même de Japan Expo.

Pourquoi les Français raffolent-ils autant de la culture japonaise ?

Depuis les années 1980 et le Club Dorothée, les dessins animés japonais introduisent la culture nippone en France. Aujourd’hui, les réseaux sociaux accentuent cet intérêt. La France est aujourd’hui le premier marché mondial du manga, juste après le Japon. Chaque lycée possède désormais son propre club cosplay. L’offre culturelle s’enrichit grâce à la gastronomie japonaise – ramen, matcha, mochi. Les Français aiment cette culture, car elle combine créativité, respect de l’artisanat et évasion esthétique. Japan Expo est la célébration annuelle qui cristallise cette passion collective.

Table ronde 'Les coulisses d’Amélie' : décryptage d’un succès franco-japonais.
Table ronde ‘Les coulisses d’Amélie’ : décryptage d’un succès franco-japonais.

Pourquoi le Japon a-t-il une culture du dessin animé aussi riche ?

Dès l’après-guerre, Osamu Tezuka impose un langage visuel inspiré du cinéma : rapide, efficace, économique. La télévision couleur propulse ensuite Astro Boy et Goldorak dans les foyers. L’industrie publicitaire finance des studios agiles, capables de produire à grande vitesse. La cassette vidéo élargit encore la diffusion. Aujourd’hui, les plateformes mondiales commandent des séries à la chaîne. Pourquoi l’animation japonaise est-elle si riche ? Parce qu’elle repose sur un écosystème vivant : auteurs, éditeurs, diffuseurs, et surtout un public passionné, fidèle et exigeant.

Showcase Cookiesan : beats sucrés, foule survoltée.
Showcase Cookiesan : beats sucrés, foule survoltée.

Qu’est-ce que l’époque Edo et pourquoi hante-t-elle encore les stands ?

Du XVIIe au XIXe siècle, le shogunat Tokugawa ferme le Japon, qui se replie sur lui-même et développe une esthétique unique : estampes ukiyo-e, cérémonies du thé, théâtre kabuki. L’époque Edo devient ainsi un socle culturel, entre raffinement, règles strictes et folklore. Sur les stands, sabres, lanternes et yokai en peluche évoquent ce passé idéalisé. L’imaginaire populaire s’en nourrit constamment. Mangas et jeux vidéo y puisent sans relâche. Même les visiteurs néophytes reconnaissent ces codes et se les approprient naturellement.

Chaque matin, Japan Expo ressuscite aussi l’esprit martial d’Edo à travers trois disciplines emblématiques : le sumo, le jō et le kendo.

Le sumo fascine par sa dimension rituelle. Deux lutteurs se font face dans un cercle sacré, sous le regard attentif d’un arbitre vêtu de soie. Le combat est bref, intense, cérémonial. Loin d’être une simple démonstration de force, c’est un rituel où chaque geste a son sens.

Initiation au sumo : tradition et pédagogie sur le dohyo improvisé.
Initiation au sumo : tradition et pédagogie sur le dohyo improvisé.

Le combat au bâton court, le jōjutsu, offre une tout autre approche. Avec élégance, les pratiquants enchaînent parades et frappes. L’arme en bois prolonge leur corps. Cette discipline, qui mêle fluidité et concentration, est à la fois spectacle visuel et méditation active.

Démonstration de jō : l’art du bâton long entre précision et élégance.
Démonstration de jō : l’art du bâton long entre précision et élégance.

Enfin, le kendo impressionne par son intensité dramatique. Deux combattants armés de sabres en bambou se font face, protégés par des armures traditionnelles. Chaque attaque, accompagnée d’un cri puissant (kiai), exprime une recherche constante de perfection et de dépassement de soi.

Démonstration de kendo : le claquement du bambou résonne hall 5.
Démonstration de kendo : le claquement du bambou résonne hall 5.

Ces trois arts martiaux, symboles vivants d’une époque révolue, permettent aux visiteurs de Japan Expo de toucher du doigt l’héritage guerrier et spirituel du Japon ancien.

Le cosplay : créativité, passion et rencontres

Phénomène incontournable, le cosplay anime chaque allée de Japan Expo. Les visiteurs incarnent leurs personnages préférés avec une créativité débordante, mêlant couture, maquillage et performance théâtrale. Certains préparent leurs tenues pendant toute une année, attendant impatiemment ce moment pour révéler leur travail. Concours, séances photo improvisées et rencontres spontanées rythment les journées.

File d’attente relookée : Bakugo explosif et Zenitsu costumé.
File d’attente relookée : Bakugo explosif et Zenitsu costumé.

Le cosplay dépasse largement le simple déguisement. Il devient un mode d’expression personnel et collectif, où les codes japonais rencontrent les sensibilités françaises. Les plus passionnés s’approprient parfois même des concepts japonais comme le wabi-sabi, l’art subtil de valoriser l’imperfection. Le cosplay, c’est vivre sa passion à fond. Créer du lien. Célébrer la richesse infinie de l’univers manga.

Finale cosplay : sirènes, renards fluo et princesses gothiques au défilé.
Finale cosplay : sirènes, renards fluo et princesses gothiques au défilé.

Reportage exclusif et interviews

Junji Itō, maître de l’horreur illustrée

Dès l’ouverture de la masterclass, Junji Itō, papa de Tomié, évoque ses influences : Kazuo Umezu, Katsuhiro Otomo, H.R. Giger et surtout Lovecraft, matrice de ses atmosphères tentaculaires.

Le mangaka décrit un quotidien spartiate. Réveil à 9 h. Travail solitaire, sans assistants. Dîner en famille. Encrage jusqu’à 2 h du matin, dans son ancien appartement devenu atelier. Il reste fidèle au papier, pour préserver « l’objet ». Mais la transition numérique l’inquiète : il redoute désormais la perte de données.

Par ailleurs, il révèle que l’esthétique des yeux blancs, leitmotiv de Junji Ito: Collection, provient du choc ressenti devant Evil Dead de Sam Raimi.

Pendant un dessin live de Tomié devant la Tour Eiffel, l’auteur salue les cosplayeurs français, louant leur créativité minutieuse qui prolonge ses visions cauchemardesques. Il rappelle son attachement à la France, premier pays à avoir traduit ses récits horrifiques.

Junji Itō dévoile un dessin exclusif de Tomié réalisé en direct.
Junji Itō dévoile un dessin exclusif de Tomié réalisé en direct.

Enfin, surprise de taille : Itō annonce qu’il prépare un nouveau manga d’horreur librement inspiré de Moby Dick, promesse d’une relecture abyssale après La Déchéance d’un homme.

Ce moment intense confirme la vitalité d’un maître. Toujours prêt à hanter nos nuits, en scan VF comme en édition collector.

Rana Saito : quand la mode devient performance vivante

Backstage : Rana Saito pose avec sa capuche-monstre kawaï.
Backstage : Rana Saito pose avec sa capuche-monstre kawaï.

Née à Tokyo en 1995, Rana Saito quitte CyberAgent en 2022 pour se consacrer à l’art vivant. Elle cofonde DIBE, un projet mêlant mode et installation. Depuis avril 2025, elle est copropriétaire d’une galerie-bar à Shibuya, tout en animant la chaîne YouTube artfranasaito.com. À Japan Expo 2025, la performeuse présente des kimonos recyclés et des spectacles associant textile, danse et réalité augmentée. Elle répond aimablement aux questions de notre directeur de publication :

Pierre‑Antoine Tsady : C’est votre première venue à Paris ?

Rana Saito : Oui, première fois, j’ai l’impression de déambuler dans un livre géant, un parc d’attractions semé de châteaux.

P‑A. T. : Quels lieux emblématiques avez‑vous déjà explorés ?

R. S. : La Tour Eiffel et le Louvre étaient incontournables pour ressentir l’histoire européenne.

P‑A. T. : Vous préparez votre premier film, que pouvez‑vous en dire ?

R. S. : Ce sera un court métrage expérimental, mon tout premier projet tourné.

P‑A. T. : Comment définir votre pratique artistique ?

R. S. : Je viens du live : performeuse plus qu’actrice, j’assemble corps, textile et son pour créer des expériences libres.

Performance 'Rencontre explosive !' – Rana Saito électrise la scène Kuro.
Performance ‘Rencontre explosive !’ – Rana Saito électrise la scène Kuro.

P‑A. T. : Le style parisien vous inspire‑t‑il ?

R. S. : Absolument, j’adore la façon dont les gens s’habillent ici, cette élégance nourrit mon regard et mes créations.

P‑A. T. : Quelles influences musicales ou scéniques revendiquez‑vous ?

R. S. : Je puise beaucoup dans la culture des idoles japonaises et leurs shows hybrides.

P‑A. T. : Un souhait pour l’amitié franco-japonaise ?

R. S. : Que des événements comme Japan Expo attirent encore plus de publics et tissent de nouveaux ponts créatifs entre nos cultures.

Kôji Fukada : le cinéma de l’intime au milieu de la foule

Kôji Fukada rencontre le public le 5 juillet 2025, sur la scène Nezumi. Il présente la conférence Love on Trial : les idols sous pression. Pendant quarante minutes, il explique la genèse de son nouveau film, sélectionné à Cannes cette année. L’intrigue : une chanteuse de J-Pop jugée pour avoir brisé la « clause no love ». Le film sortira en France en 2026, grâce aux Saisons Hanabi. Il promet une plongée directe dans l’envers du divertissement japonais.

Révélé dans Hospitalité, Fukada enchaîne avec Suis-moi je te fuis, L’Infirmière ou encore La Comédie humaine. Depuis quinze ans, il décortique les failles de la société nippone : obsession amoureuse, rumeurs, culpabilité. Son style, proche du naturalisme français, explore les rapports familiaux et professionnels avec une douce ironie.

Kôji Fukada présente son nouveau film 'Love on Trial' devant le public parisien.
Kôji Fukada présente son nouveau film ‘Love on Trial’ devant le public parisien.

Love on Trial va plus loin. À travers un procès très médiatisé, Kôji Fukada interroge la frontière entre image publique et liberté d’aimer. Il répond aux questions de notre fondateur :

Pierre-Antoine Tsady : Quels cinéastes français appréciez-vous particulièrement ?

Kôji Fukada : Éric Rohmer avant tout. Mais il y en a beaucoup d’autres, vraiment beaucoup, dont les œuvres m’inspirent régulièrement.

P-A. T. : Que pensez-vous de L’Empire des sens, ce grand film japonais coproduit par des Français ?

K. F. : C’est un film très intéressant, aussi bien sur le plan artistique qu’humain, mais pour un public averti.

P-A. T. : Si la Maison du Japon à Paris (MCJP) organisait un festival du cinéma, accepteriez-vous d’y participer ?

K. F. : Oui, bien sûr. Ce serait une excellente occasion pour renforcer les échanges culturels et permettre aux Français de découvrir davantage mon travail.

P-A. T. : Quel message politique ou social souhaitez-vous transmettre dans vos films aujourd’hui ?

K. F. : Je préfère éviter les messages explicites, car cela pourrait transformer mes films en propagande. Mon but est plutôt d’inviter les spectateurs à réfléchir et à interpréter librement ce qu’ils voient.

P-A. T. : Quels acteurs français aimeriez-vous diriger dans un prochain film ?

K. F. : Amanda Langlet, même si elle joue peu actuellement, et Marie Rivière. Et bien entendu, Isabelle Huppert : je l’ai rencontrée au Japon, c’est une actrice extraordinaire avec qui j’adorerais travailler.

Takahiro Sakurai : la voix qui traverse les frontières de l’animé

Takahiro Sakurai, né le 13 juin 1974, est l’une des voix les plus emblématiques de l’animation japonaise. Dès le lycée, il se passionne pour le doublage. Aujourd’hui, il prête sa voix à Giyu Tomioka dans Demon Slayer, Griffith dans Berserk, le Medicine Seller dans Mononoke, ou encore Cloud dans Final Fantasy VII: Advent Children. Trois décennies de séries et de longs-métrages cultes.

Invitée vedette de la scène Nezumi à Japan Expo le 5 juillet 2025, Sakurai présente La Forteresse invisible, premier film du nouvel arc de Demon Slayer, dont la sortie est prévue en France le 17 septembre. Il promet une œuvre « magnifique », avec « encore plus de beauté que ce que vous imaginez ». Le public, conquis, acclame les images du trailer très prometteur et les fameux yeux de Kimetsu. Et l’acteur déclare : « J’adore la France, je vous aime ! ».

Pour Sakurai, Demon Slayer marque un tournant : « Cette œuvre exceptionnelle me motive à continuer à travailler. » Il repart avec un seul souhait : revenir vite en France, poussé par l’énergie de ses fans à Japan Expo.

En bordure du salon : visite surprise de Gabriel Attal en précampagne pour 2027

Japan Expo est devenue le phare majeur des cultures japonaises en France. Chaque été, Paris attire des foules de passionnés. Mangas, cosplay, jeux vidéo : tout séduit une jeunesse connectée et avide de découvertes. Cette édition a aussi vu la visite remarquée de Gabriel Attal. L’ancien Premier ministre, stratège, vise déjà la jeunesse pour 2027. Sa venue, tout sauf anodine, révèle combien le salon est désormais un enjeu culturel et politique. Derrière les sourires, la compétition politique s’aiguise.

@gabriel_attal

Énorme quelqu’un a fait un cosplay de Gabriel Attal à la Japan Expo

♬ original sound – Gabriel Attal
Le salon Japan Expo 2025 a accueilli un visiteur prestigieux : l'ancien premier ministre Gabriel Attal, adepte des bains de foules.

Au fond, la magie de Japan Expo reste intacte. On quitte les stands avec l’impression que l’avenir, ici, se nourrit d’imaginaire, de passion et de renouveau. Affluence massive, énergie partagée. Toutes les générations réunies par un même souffle. À l’an prochain, pour d’autres mondes à explorer.

Cet article a été rédigé par Pierre-Antoine Tsady.