
George Simion, né en 1986 à Focșani, s’impose aujourd’hui comme l’un des personnages centraux de la politique roumaine. À 38 ans, il incarne une nouvelle génération de dirigeants nationalistes, rompant avec les figures usées de la transition post-communiste. Après avoir longtemps milité pour l’unification de la Roumanie et de la Moldavie, il canalise le ressentiment populaire. De plus, ce ressentiment est nourri par les inégalités sociales, la corruption persistante et la perte de repères identitaires. En 2025, porté par un vent de défiance contre les élites, il arrive en tête du premier tour. En outre, il obtient près de 41 % des voix à la présidentielle.
Sa percée traduit une recomposition politique profonde. La Roumanie a longtemps été perçue comme un élève modèle de l’Union européenne en matière de réformes. Cependant, elle est aujourd’hui traversée par des courants souverainistes et conservateurs. Ainsi, le succès de Simion illustre la fin d’un consensus européen autrefois prédominant parmi les grandes formations politiques.

Une trajectoire politique atypique
George Simion débute son engagement en faveur de la cause nationale roumaine en Moldavie, un thème symbolique pour nombre de Roumains attachés à l’idée d’une unité historique perdue. Dès ses premières actions, il subit plusieurs interdictions d’entrée dans le pays voisin. Cependant, loin de se résigner, il politise cet ostracisme et s’affirme comme un héraut de l’identité nationale bafouée.
En 2019, il fonde l’Alliance pour l’unité des Roumains (AUR), alors perçue comme un groupuscule marginal. À l’époque, son parti recueille moins de 1 % aux européennes. De plus, son échec initial nourrit une stratégie de terrain patiente, axée sur les petites villes, les campagnes, et les diasporas rurales.

Lors des législatives de 2020, l’AUR crée la surprise en obtenant près de 9 % des suffrages, profitant d’une dynamique de rejet des partis traditionnels, accusés de connivence avec des intérêts étrangers.
Simion capte ainsi une société épuisée par des décennies de difficultés économiques et de désillusions politiques. De 2020 à 2025, il tisse un réseau de fidèles. Par ailleurs, il multiplie les tournées locales et les campagnes sur les réseaux sociaux. Ainsi, il apparaît comme l’alternative incontournable.
Les valeurs et programmes portés par George Simion
George Simion se présente comme le défenseur d’une Roumanie souveraine, enracinée et réfractaire à l’acculturation européenne. Ainsi, il promeut une "Grande Roumanie", concept nostalgique réunissant les territoires historiques roumains au-delà des frontières actuelles. Cette revendication, bien que sans conséquence immédiate, flatte un sentiment national profond, exacerbé par les tensions régionales.
Opposant déclaré au mariage homosexuel et à la "propagande woke", il porte un discours sociétal conservateur qui résonne dans une Roumanie où l’Église orthodoxe conserve une influence considérable. Par ailleurs, il dénonce l’Union européenne comme un système "technocratique et déconnecté". Toutefois, il affirme pragmatiquement l’importance de maintenir la Roumanie au sein de l’alliance occidentale.

Son programme électoral met l’accent sur la réduction de la bureaucratie. De plus, il soutient massivement les familles traditionnelles et protège les intérêts économiques nationaux. De plus, il plaide pour des politiques de rapatriement de la main-d’œuvre médicale roumaine. Cette main-d’œuvre est exilée en Europe occidentale par manque d’opportunités locales.
Sur le plan international, il se rapproche du courant MAGA de Donald Trump, dont il partage la rhétorique anti-système et la méfiance envers les engagements multilatéraux.
George Simion dans le contexte européen
La montée de George Simion s’inscrit dans une tendance lourde de défiance envers les institutions européennes. Comme Giorgia Meloni en Italie ou Viktor Orbán en Hongrie, il propose un souverainisme enraciné, soucieux de préserver l’identité nationale face aux flux migratoires et aux normes libérales imposées depuis Bruxelles.

Son parti est membre du groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR). Il prône une Europe des nations plutôt qu’une intégration accrue. Ainsi, Simion incarne une alternative aux modèles intégrationnistes, revendiquant une union politique souple fondée sur le respect des souverainetés.
Cependant, à la différence d’un Orbán, son discours se veut moins ouvertement russophile, soucieux de rassurer une population restée marquée par la mémoire de la domination soviétique.
Défis et controverses
George Simion demeure une personnalité hautement clivante. Accusé de connivences obscures avec des agents russes, notamment par des responsables moldaves, il réfute vigoureusement ces allégations. Cependant, ses positions ambivalentes sur le conflit ukrainien nourrissent les soupçons, dans une Roumanie où l’alignement pro-occidental est historiquement fort.
Il suscite également la controverse par ses références à des figures polémiques de l’histoire roumaine, comme certains anciens dignitaires. Ceux-ci sont accusés d’avoir réprimé la révolution de 1989.

De plus, sa stratégie de communication est très axée sur TikTok et les médias alternatifs. Cela lui vaut des accusations de manipulation des jeunes électeurs.
Enfin, son projet implicite de redéfinir les frontières nationales fait craindre une déstabilisation régionale. À l’heure où l’Europe de l’Est reste un espace stratégique hautement sensible.
Une figure emblématique des bouleversements politiques européens
George Simion illustre la profonde mutation de la politique roumaine et, au-delà, des démocraties européennes confrontées à une remise en cause de l’ordre libéral. Ainsi, sa montée fulgurante révèle l’ampleur du rejet des élites traditionnelles, nourri par les crises économiques, culturelles et sociétales.
En 2025, il se présente comme un acteur majeur capable de redéfinir la trajectoire de la Roumanie. Cela se produit dans un contexte géopolitique sous tension. Sa figure, qu’elle soit perçue comme une menace ou une chance, symbolise un tournant. De plus, son ascension rapide souligne combien la tentation souverainiste et populiste reste vive au cœur de l’Europe contemporaine. En effet, le "vent de l’histoire" semble avoir changé de direction.